Révolution ou guerre n°21

(Juin 2022)

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Contre la guerre impérialiste, pour la guerre de classe, Appel internationaliste de la Tendance communiste internationaliste

Nous nous associons à l’appel lancé par les camarades de la Tendance communiste internationaliste pour que les révolutionnaires fidèles à l’internationalisme prolétarien se regroupent dans des « comités no war but the class war » [non à la guerre, oui à la guerre de classe]. Nous ne rejoignons pas cette initiative au nom d’un principe internationaliste abstrait valable en tout temps et en toute occasion. Mais parce que cet appel, dont nous partageons chaque point, chaque phrase ou presque, se veut une première réponse à la menace « d’une guerre plus généralisée d’une manière encore jamais vue depuis 1945 ». Si d’aucun pouvait douter jusqu’alors que le capitalisme en crise ne pouvait offrir à l’humanité, inéluctablement, que l’alternative révolution prolétarienne mondiale ou guerre impérialiste généralisée, la guerre en Ukraine a rendu cette perspective ô combien concrète et d’actualité.

Comme le dit la TCI, cet appel à former des comités « "Contre la guerre, Pour la guerre de classe" est une initiative internationale mais pas un embryon d’Internationale. » Les conditions pour celle-ci sont loin d’être réunies aujourd’hui. De même, toute conférence internationaliste du type de Zimmerwald durant la Première guerre mondiale serait largement prématurée du fait, non pas tant de la situation historique en soi, mais de l’état, en particulier de dispersion et de division, des forces internationalistes – ne serait-ce que parce qu’une partie d’entre elles rejette toute perspective de Troisième guerre mondiale, faisant ainsi de l’internationalisme prolétarien un principe abstrait et en soi qui ne peut déboucher, au mieux, que sur le pacifisme que l’appel de la TCI, à raison, rejette.

Pour l’heure, et vu la réalité limitée des luttes prolétariennes et l’état du camp révolutionnaire, il s’agit de permettre « aux minorités révolutionnaires dispersées d’aujourd’hui de combiner leurs forces et de transmettre le message de la nécessité de se battre à une classe ouvrière plus large. » L’objectif est plus modeste mais correspond tout à fait à la situation actuelle et à ses possibilités. Dans la mesure de nos moyens, nous le faisons nôtre.

Le GIGC, 10 avril 2022

Contre la guerre, Pour la guerre de classe - Un appel pour agir
(TCI, 7 avril 2022)

1) L’invasion russe de l’Ukraine n’est pas un acte isolé. C’est le début d’une nouvelle période de rivalités impérialistes qui menace d’une guerre plus généralisée d’une manière encore jamais vue depuis 1945.

2) Aucun pays aujourd’hui n’est en dehors du système capitaliste. L’intensification de la rivalité impérialiste est le produit de la crise économique toujours non résolue du capitalisme qui date maintenant depuis plusieurs décennies. Durant cette période, le capitalisme a été contraint de recourir à nombre d’expédients pour gérer sa crise économique provoquée par la baisse du taux de profit. Ce que cela a causé à la classe ouvrière mondiale, c’est une exploitation plus intense, une plus grande précarité des emplois et un déclin continu de la part des travailleurs dans la richesse qu’ils produisent. Non seulement ce système mène à la guerre, mais sa recherche insatiable de profit mène aussi à la destruction de la planète.

3) Cependant, la mondialisation, la financiarisation et le soi-disant néolibéralisme, toutes ces réponses à la chute du taux de profit, ont abouti à l’éclatement de l’énorme bulle spéculative mondiale en 2008. Elles n’ont fait que prolonger la crise - pas la résoudre. Les contradictions du système s’accumulent et aucun Etat n’en est immunisé.

4) L’une des contradictions les plus flagrantes est que l’Occident a transféré des investissements vers des économies à bas salaires dans les années 1980. Le plus grand bénéficiaire en a été la Chine qui a construit son économie grâce à l’exploitation massive de sa main-d’œuvre à bas salaires pour fournir des produits de base bon marché afin d’alléger la pression à la baisse sur les revenus des travailleurs occidentaux. Cet arrangement avantageux pour le capitalisme mondial a cependant commencé à s’effondrer dès que l’essor économique a permis à la Chine de commencer à concurrencer les États-Unis sur toute la planète. Ce mariage de convenance économique s’est effondré et s’est pleinement révélé après l’éclatement de la bulle spéculative en 2008, intensifiant ainsi les contradictions déjà existantes du système.

5) L’éclatement de cette bulle aurait conduit à une crise capitaliste mondiale sans précédent depuis 1929 si les Etats n’étaient pas intervenus pour absorber les dettes du système financier. Mais ‘l’assouplissement quantitatif’ n’a, ni résolu la crise globale, ni l’augmentation de l’exploitation à des niveaux inhumains. Ce dont le capitalisme a besoin, c’est d’une dévaluation massive du capital qui va au-delà de l’amortissement des actifs existants et cela nécessite une guerre généralisée. Cette propulsion vers la guerre généralisée a pris de l’ampleur depuis un certain temps. Avec de moins en moins d’options ouvertes aux dirigeants du monde, il y a de moins en moins de place pour le compromis sur ce que sont les ‘intérêts nationaux’. Plus ils sont désespérés, plus ils sont susceptibles d’utiliser des armes de destruction massive qui menacent l’avenir de l’humanité (en un temps encore plus court que la menace très réelle que représente le changement climatique). En fait, la menace d’une guerre mondiale est liée à la catastrophe environnementale qui se produit déjà en raison de l’épuisement croissant des ressources naturelles et de la destruction de l’environnement provoqués par un système de plus en plus en crise.

6) La seule force capable d’empêcher cette catastrophe, et la guerre en général, est la classe ouvrière mondiale, dont la force collective peut d’abord paralyser l’effort de guerre, puis renverser l’ordre capitaliste. Les travailleurs salariés du monde entier partagent une position objective commune en tant que créateurs de la richesse mondiale qui aboutit dans les mains de leurs exploiteurs. En tant que tels, ils n’ont aucun pays ni intérêts nationaux à défendre. Eux seuls sont en mesure de créer une nouvelle société sans classes dans laquelle il n’y a pas d’Etats, où la production est coopérative, et conçue pour répondre aux besoins du plus grand nombre et non aux profits de quelques-uns. Ainsi, les conditions existent pour une communauté mondiale de producteurs librement associés où les gens donnent ce qu’ils peuvent et ne prennent que ce dont ils ont besoin.

7) Pour y parvenir, la classe ouvrière a besoin de s’organiser, ou peut-être de se réorganiser. Dans la lutte quotidienne contre les réductions de salaire, etc., les travailleurs seront obligés de former des comités de grève élus et révocables par tous les travailleurs pour unir leur lutte. Mais cela ne suffira pas à stopper les attaques des capitalistes. Les luttes isolées dans un secteur ou sur un lieu de travail sont facilement gérées par les patrons et les syndicats complices. Tous les comités de grève doivent s’unir pour former un mouvement de classe plus large qui puisse entamer le processus de dépassement de l’État existant.

8) Il est inévitable que dans ce processus, certains travailleurs en viennent à reconnaître l’impasse de l’existence capitaliste avant les autres. Il est impératif que ces derniers s’organisent politiquement à un niveau international afin d’offrir une voie claire pour l’avenir. Cela ne se produira pas immédiatement, surtout pas après des décennies de recul des luttes des travailleurs face à l’assaut capitaliste. Cependant, la situation actuelle en Ukraine est un avertissement de ce que les gouvernements réservent aux travailleurs partout dans le monde et nous devons réagir, non seulement à l’exploitation quotidienne, mais aussi aux plans politiques de ‘nos’ dirigeants.

9) Dans la situation actuelle de désastre humanitaire, nous n’avons pas d’illusion sur la possibilité qu’un mouvement de classe puisse surgir bientôt, même si l’histoire a maintenant pris un nouveau tournant désespéré. Nous devons construire ensemble quelque chose qui s’oppose à la fois à l’exploitation et à la guerre. Même si la crise actuelle en Ukraine se termine par un accord de fortune, cela ne peut que semer les graines pour le prochain cycle de conflits impérialistes. L’invasion de l’Ukraine a déjà jeté la Russie dans les bras de la Chine et rallié l’OTAN et l’UE aux États-Unis et à leurs objectifs.

10) Le capitalisme signifie la guerre et c’est le capitalisme qu’il faut arrêter. Nous proposons donc de mettre en place des comités ’No War but the Class War’ partout où nous sommes présents et d’inviter à y participer les individus et les groupes qui s’opposent à tous les nationalismes et reconnaissent que la seule guerre qui vaille la peine d’être menée est la guerre de classe pour mettre fin au capitalisme et à ses conflits impérialistes sanglants. Cela permettra aux minorités révolutionnaires dispersées d’aujourd’hui de combiner leurs forces et de transmettre le message de la nécessité de se battre à une classe ouvrière plus large.

11) "Contre la guerre, Pour la guerre de classe" est une initiative internationale mais pas un embryon d’Internationale. Cela ne se produira que lorsque la guerre de classe se développera en un mouvement capable de s’attaquer à l’ordre capitaliste mondial. Cependant, elle offre une boussole politique pour les révolutionnaires de différents horizons qui rejettent toutes les politiques sociales-démocrates, trotskystes et staliniennes consistant, soit à se ranger carrément d’un côté d’un impérialisme ou d’un autre, soit à décider que l’un ou l’autre est un ‘moindre mal’ qu’il faut soutenir, soit à approuver le pacifisme qui rejette la nécessité de transformer la guerre impérialiste en guerre de classe, ce qui sème la confusion et désarme la classe ouvrière pour qu’elle n’entreprenne pas sa propre lutte.

12) Enfin, nous devons souligner qu’il ne s’agit pas d’un appel au pacifisme, qui n’est au fond qu’un plaidoyer pour un retour à la ‘normale’. Le problème concerne justement cette ‘normalité’ - c’est-à-dire le système capitaliste lui-même qui génère les forces qui mènent à la guerre. Être contre la guerre sans appeler à la fin du capitalisme, c’est comme attendre que le capital ne produise pas de profits sans renverser le système d’exploitation, alors que ce dernier est la condition nécessaire à l’existence du premier.

Si ces points convergent pour l’essentiel avec votre propre position, nous aimerions connaître votre opinion.

Camarades de la Tendance Communiste Internationaliste

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