L’évolution des camps révolutionnaire et prolétarien – ce dernier plus directement lié à la Gauche communiste internationale – est aussi une expression de l’évolution du rapport de forces historique entre les classes bourgeoise et prolétarienne. Même si elle n’en est pas le produit direct et mécanique et connaît sa propre dynamique contradictoire. À leur tour, les forces politiques révolutionnaires, comme expressions les plus hautes – ou les plus développées – de la conscience de classe, interviennent, elles-aussi, certes de manière non directe, ni mécanique, sur le développement de la lutte des classes. Elles en sont, au même titre que les luttes ouvrières elles-mêmes, un produit et un facteur actif. Non parce qu’elles influeraient aujourd’hui directement sur les luttes ouvrières – cela n’arrive encore que dans de trop rares exceptions et dans des limites très réduites – mais dans la mesure où elles sont capables de défendre et réaffirmer les positions de classe – en particulier l’autonomie de classe face à l’État bourgeois et l’internationalisme prolétarien face aux nationalismes et aux guerres impérialistes –, de définir et d’avancer une compréhension générale de la situation historique – en relation à l’alternative historique révolution ou guerre – et de présenter des orientations concrètes pour les luttes les plus significatives dans le sens de leur extension et unification contre les forces étatiques et la classe capitaliste. En tant que telles, ces prises de position politiques de classe deviennent des éléments matériels de l’affrontement entre la bourgeoisie et le prolétariat et de l’évolution de leur rapport de force.

Dans ce sens l’apparition de nouvelles voix communistes telles que Nuevo Curso en Espagne (www.nuevocurso.org) ou encore Worker’s Offensive aux États-Unis (www.workersoffensive.org/) confirme, selon nous, que le prolétariat international, comme classe révolutionnaire, tend à se doter aussi des outils politiques, groupes communistes et demain parti communiste mondial, dont il a besoin dans les confrontations massives qui arrivent.

Nuevo Curso est un blog de camarades qui a commencé à publier depuis septembre dernier des prises de position régulières sur la situation et sur des questions plus larges, voire théoriques. Malheureusement, elles ne sont qu’en espagnol. L’ensemble des positions qu’il défend sont très clairement de classe et se situent dans le cadre programmatique de la Gauche communiste. Il ne se définit pas comme un groupe politique et distingue les “ avant-gardes contingentes ” (dont il fait partie) et les “ avant-gardes historiques ” (les groupes politiques de la Gauche communiste). Ces catégories et la démarche des camarades ne correspondent pas, du moins formellement, à “ nos propres catégories ”, groupes politiques, cercles de discussion ou encore “ organes intermédiaires ” (cf. RG #8), etc. Pour autant, nous sommes très favorablement impressionnés, non seulement par leur rappel sans concession des positions de classe, mais surtout par la qualité “ marxiste ” des textes des camarades et leur capacité d’analyse et d’orientation dans le cours des événements et des situations : Espagne et Catalogne bien sûr, mais aussi les manifestations prolétariennes en Iran, les rivalités impérialistes avec la question de la Corée du Nord ou encore le Venezuela et le chavisme… ou encore une histoire de la Gauche communiste en Espagne que nous recommandons particulièrement.

Pour une grande part, il en va de même pour le groupe Worker’s Offensive qui publie Intransigence. Contrairement à Nuevo Curso, il se définit comme groupe politique. Ses positions de base s’inscrivent elles-aussi dans le cadre programmatique de la Gauche communiste même si elles ne mentionnent pas la conscience de classe, le “ rôle des révolutionnaires ”, ni la question du parti comme “ organe de direction politique ”. Néanmoins l’éditorial d’Intransigence #1 aborde la question plutôt positivement à nos yeux. La revue dénonce particulièrement et avec un certain brio l’idéologie et les forces politiques bourgeoises de gauche sur des thèmes peu abordés tels Le Dilemme de la santé dans le capitalisme [Capital’s Health Dilemma] ou encore celui de l’utilisation des “ identités raciales ”, au nom de l’anti-racisme, L’impasse des politiques identitaires raciales [The Dead-End of Racial Identity Politics].

Nous voulons aussi attirer l’attention sur la revue A Free Retriever’s Digest qui regroupe les articles de la presse révolutionnaire que les éditeurs trouvent les plus intéressants. Apparemment sans autre ambition que celle-ci, la revue a le mérite de fournir un point de référence pour les débats et les divergences qui existent dans le camp révolutionnaire international.

Sans préjuger de leur devenir et de leur impact futur dans les camps révolutionnaire et prolétarien, il s’agit là pour nous d’expériences nouvelles que nous suivrons avec attention et intérêt. Dans la mesure de nos possibilités et en fonction de nos priorités politiques, nous essaierons de participer à les faire connaître du plus grand nombre au niveau international. Une des deux principales orientations politiques ayant fondé notre groupe consiste à regrouper et focaliser l’ensemble des forces révolutionnaires autour des positions et des débats de la Gauche communiste et de ses expressions matérielles, groupes et cercles politiques, et plus particulièrement autour de sa principale organisation aujourd’hui, la Tendance Communiste Internationaliste. En à peine quelques mois, grâce à leur activité et leur dynamisme, Nuevo Curso et Worker’s Offensive s’inscrivent de facto, dans ce combat avec une démarche originale en particulier pour le premier, mais aussi d’une manière active, ouverte et non sectaire.

Les contrastes de plus en plus aiguës qui traversent le monde capitaliste, exercent aussi leurs effets sur les révolutionnaires. Le camp prolétarien et plus particulièrement la Gauche communiste sont visiblement affectés aussi par les secousses pré-sismiques des confrontations massives entre les classes. Sous la contrainte historique, certaines forces comme le CCI [1] qui vient de tenir son 22^e congrès et du fait de ses propres contradictions, deviennent des momies pétrifiées. En sens inverse, de nouvelles forces et générations surgissent. Le devenir et le passé. C’est un défi pour les groupes de la Gauche communiste qui restent dynamiques tels la TCI ou nous-mêmes.