Révolution ou Guerre n°14

(semestriel - février 2020)

PDF - 467.3 ko

AccueilVersion imprimable de cet article Version imprimable

Commentaires critiques rapides sur notre communiqué et notre réponse

Tout en recevant des commentaires de soutien et d’accord avec nos orientations, nous avons aussi reçu quelques critiques. Elles portaient essentiellement sur deux points : notre dénonciation des syndicats à partir du 18 et de leur participation, de fait, lors de la période de fêtes, à la fameuse trêve de Noël, c’est-à-dire à la politique de pourrissement mené par le gouvernement afin d’épuiser les secteurs en grève. Elle fut critiquée, en particulier par des cheminots grévistes, car elle portait atteinte à l’unité des assemblées alors même que "malgré tout, les syndicats appelaient à la journée du 9 janvier". Très rapidement sur ce point : pour nous, l’unité des travailleurs n’est pas dans l’unité des syndicats, mais dans la dynamique des assemblées générales à étendre et unifier la lutte, ici la grève, dynamique à laquelle les syndicats qu’ils soient de "droite" (CFDT, UNSA) ou de "gauche" (CGT,FO...) s’opposent toujours et cherchent à saboter. L’autre critique a porté sur l’attention que nous portions aux revendications dans notre communiqué du 8 décembre. Nous publions ci-après un échange avec un camarade.

Bonjour,

Il serait temps de rentrer en contact avec Francis Cousin et le groupe maximaliste "Guerre De Classe" afin de sortir de vos ambitions réformistes. La retraite à 60 ans et les augmentations salariales ne sont pas des solutions révolutionnaires, ce sont des revendications syndicales qui nous maintiennent enfermer dans le carcan capitaliste. La retraite à 60 ans va-t-elle mettre fin à l’exploitation de l’homme par l’homme ? Non, elle va seulement en atténuer légèrement les effets. L’augmentation des salaires pour faire quoi ? Pour acheter la paix sociale et que les prolétaires se remettre au boulot sans broncher ? Nous ne voulons pas coloriez nos chaînes. Au Diable vos rapiéçages comme disait Engels !
ET VIVE LA RÉVOLUTION ! VIVE L’ABOLITION DU CAPITAL POUR UNE VIE ENFIN HUMAINE !

http://guerredeclasse.fr/2019/

Bien à vous, ReC.

Notre réponse :

Cher camarade,

Désolé de te répondre aussi rapidement et sommairement alors que ta critique mériterait une réponse plus approfondie même s’il s’agit là d’un débat historique qui fut, à notre opinion, déjà tranché dans le passé. Tu nous pardonneras la rapidité de cette réponse et son ton peut-être polémique.

Le "réformiste" n’est pas forcément celui que tu crois. C’est plutôt celui qui réduit ou limite toute revendication à sa seule dimension économique sans en comprendre sa dimension avant tout politique dans tout combat de classe du prolétariat. Qu’il s’en empare pour en faire le seul et unique but, et ainsi dévier le combat de classe de son affrontement à l’État capitaliste, ou bien qu’il la rejette par principe abstrait et "radical", voire moral, car elle pourrait corrompre une lutte pure et idéale (ce qui, in fine, mène tout autant à ignorer et s’écarter de l’affrontement politique à l’ensemble de l’appareil d’État), ne change rien à la communauté de démarche de méthode - les deux "erronées" - et d’incompréhension de la dynamique même de la lutte prolétarienne et de la luttes des classes. Dimensions économique et politique s’entrecroisent et sont deux moments du processus de la lutte des classes...

Pour les "marxistes", le combat sur le choix des revendications - lorsqu’il se pose, aucun absolu - vise à imposer des revendications dans lesquelles le plus grand nombre de prolétaires, d’un moment et d’un lieu donnés, puissent se reconnaître et s’engager dans la lutte collective. Les revendications économiques ne sont pas un but en soi mais un moment et un moyen de développement et d’unification de la lutte. Nous acceptons la critique sur les propositions que nous faisons aujourd’hui - les revendications que nous avançons peuvent ne pas être celles qui correspondent aux nécessités de l’extension et de la généralisation du combat. Mais nous maintenons qu’il y a en général un combat à mener contre les revendications avancées par les syndicats et les gauchistes, aujourd’hui, ce lundi et mardi, contre le "simple retrait" du projet. En lien avec le contrôle général actuel de la bourgeoisie, syndicats en tête, sur le développement de cette lutte, cette revendication des syndicats redonne politiquement la main au gouvernement, aux partis de gauche et aux syndicats et impose le terrain bourgeois et il faut la combattre.

Pourquoi la décote ? Notre proposition est discutable et à débattre. La suppression de toute décote sur les retraites, qui affecte tout le monde et retarde de fait tous les départs à la retraite au-delà de l’âge légal (-5% par année manquante), non seulement peut rassembler un maximum de prolétaires et les aider à les engager dans la lutte par delà les corporations et les différents systèmes de retraite (sur lesquelles la bourgeoisie veut nous enfermer pour diviser) mais, de plus, il impose au capital le terrain et la logique du prolétariat qui rejette toute considération de ’bonne gestion’ ou autre argument économique... Maintenant si des camarades, ou des ouvriers avancent la revendication de 55 ans pour tous, nous n’avons rien contre si elle devient un objectif réel et concret dans lesquels un maximum de prolétaires se reconnaissent et la prennent à leur compte dans le combat. Nous n’avons pas d’absolu "comptable" sur les revendications mais juste une appréciation politique selon les moments et les lieux, selon la dynamique du combat prolétarien. Il en va de même bien sûr pour les revendications salariales même si toute avancée sur ce plan est aussitôt remise en cause par le capital. La lutte de classe pour les salaires est aussi un moment du combat révolutionnaire du prolétariat pour... l’abolition du salariat. Marx l’a très bien expliqué lui-même.

Plus profondément, nous t’invitons à lire (ou relire) Grève de masse, parti et syndicat de Rosa Luxemburg (entre autres). Et nous te rappelons que février 1917 démarra sur une manifestation de femmes prolétaires pour le pain, revendication économique, et l’insurrection d’octobre 1917 eut lieu, non pas au nom d’une idée aussi radicale puisse-t-elle comme celle de Révolution, mais pour l’arrêt de la guerre et la paix - revendication au caractère à la fois politique et économique - que seule l’insurrection et la dictature du prolétariat pouvaient assurer.

Donc, attention aux postures radicales qui, bien souvent, ne sont que l’autre face de ce que tu appelles le "réformisme".

Salutations communistes, J. pour le GIGC.

Accueil