Révolution ou Guerre n°3

(Février 2015)

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Luttes ouvrières dans le monde

Les actions de résistance de la classe ouvrière contre les mesures de crises ne cessent de se produire et même augmentent. La classe ouvrière depuis l’intensification de la crise du capitalisme en 2008 ne se soumet pas, au contraire. Lors des années 30, la classe ouvrière était soumise idéologiquement à la bourgeoisie. Des millions de prolétaires ont donné leur vie pour défendre la démocratie que ce soit en Espagne ou lors de la deuxième guerre mondiale. La classe ouvrière mettait de côté ses intérêts à court et à long terme et les ouvriers, dans leur très grande majorité, ont défendu les intérêts de la bourgeoisie d’abord espagnole, puis celle des Alliés dans la Résistance et celle du capitalisme d’État russe contre celles du fascisme pendant la 2e Guerre mondiale.

Aujourd’hui, elle n’est pas prête à se sacrifier économiquement et surtout physiquement dans l’intérêt de la bourgeoisie[1]. Le but de cette page est de combattre la censure et le black-out des médias bourgeois sur les luttes ouvrières et, surtout, de mettre en relief que la classe se défend de plus en plus, en particulier dans les pays centraux et en marquant des avancées de la lutte et de la conscience dans les rangs ouvriers. La grande majorité de ces luttes et manifestations sont encore contrôlées étroitement par les syndicats. Ceux-ci les maintiennent dans un cadre soi-disant réformiste et légal. Les syndicats montrent bien qu’ils font partie de l’appareil d’État en les détournant d’une lutte véritablement anticapitaliste. En Belgique, lors de la grève des cheminots dont nous rendons compte dans le communiqué (sous forme de tract) que nous reproduisons ici à la suite de cet article, les syndicats ont perdu le contrôle et n’ont pas réussi à s’opposer à l’éclatement des grèves : « Si ce gouvernement ne fait pas marche arrière, nous risquons de ne plus pouvoir contrôler nos troupes », a affirmé, dans le journal Le Soir, un leader du syndicat chrétien CSC. Et ce n’est qu’au prix d’une succession de journées d’action jusqu’au 15 décembre que la bourgeoisie belge et ses syndicats ont réussi à en terminer avec cette période particulière de mobilisation ouvrière dans le pays. La succession de grèves en Allemagne, Lufthansa et chemins de fer en particulier, exprime elle-aussi le cours et l’importance des luttes ouvrières à venir en Europe. Voici donc une liste, non exhaustive, de, celles-ci au cours des derniers mois de 2014 qui nous semblent significatives de la réalité et des potentialités (tout comme des limites et des manques) de la combativité prolétarienne internationale.

Belgique : Le 20 octobre, les cheminots de Charleroi sont en grève sauvage. Ils doivent subir le sabotage du« syndicat autonome des conducteurs de train (SACT) ». Auparavant les cheminots de la région de Louvière s’étaient déjà mis en grève sauvage. Le 6 novembre, plus de 120 000 travailleurs ont manifesté à Bruxelles contre les mesures de crise. Cette manifestation s’est terminée par des affrontements très violents entre la police et principalement les dockers d’Anvers et les métallos de Wallonie. Ensuite, une vague de grèves tournantes dans les provinces d’Anvers, du Luxembourg, de l’Hainaut et du Limbourg le 24 novembre mis de l’avant par les syndicats à permis de reporter une grève générale. Le 15 décembre, les travailleurs des aéroports, des écoles, des services publics des hôpitaux et du transport public ont débrayé contre les mesures pro-austérité. Les grévistes ont monté des piquets de grèves et des barrages des routes principales des régions aussi bien flamandes que francophones, ne se laissant pas diviser par les nationalistes.

Allemagne : Le 20 octobre (le même jour que la grève des cheminots belges), le personnel de la Lufthansa (la compagnie aérienne allemande) était de nouveau en grève prenant ainsi le relais de la grève des cheminots allemands du week-end précédent. Le fait que ces luttes paralysent les transports nationaux et internationaux oblige les médias de la bourgeoisie à les mentionner au risque, sinon, de se décrédibiliser complètement.

Espagne : Des centaines de milliers de personnes sont descendues le samedi 29 novembre dans la rue à Madrid, Barcelone et la plupart des grandes villes pour protester contre l’austérité que la bourgeoisie leur a imposée et la misère qui les frappe de plein fouet.

Grande-Bretagne : Mi-octobre des grèves et manifestations avaient eu lieu dans tout le pays sous le contrôle des syndicats, jusqu’à de grandes manifestations à Londres, Glasgow, etc..

Grèce  : Vingt cinq mille personnes, selon la police, ont manifesté le samedi 1er novembre à Athènes contre l’austérité. « Nous ne sommes pas que des chiffres, nous méritons des conditions de vie humaine », ont scandé les manifestants place Syntagma, face au Parlement, à Athènes.

Irlande  : Manifestation contre la facturation de l’eau à Dublin. Ce sont les manifestations les plus importantes contre l’austérité depuis le début de la crise financière que connaît le pays. Plus de 100 000Irlandais ont manifesté contre les mesures d’austérité du gouvernement et son projet de facturer l’eau.

Italie  : Un million et demi d’Italiens ont défilé vendredi 12 décembre dans les rues de plus de 50 villes à l’occasion d’une grève générale contre le projet de budget 2015 et la réforme du marché du travail. À Turin et à Milan, ces manifestations ont fini en affrontements violents avec la police.

Portugal : Plusieurs milliers de fonctionnaires ont manifesté, vendredi 31 octobre, dans les rues de Lisbonne pour protester contre les coupes salariales et l’augmentation des horaires de travail, après l’adoption du projet de budget pour 2015 au Parlement.

Ukraine : Manifestation à Kiev contre les mesures d’austérité. Plusieurs milliers de personnes, travailleurs, retraités et étudiants, ont manifesté le 23 décembre devant la Rada (parlement) à Kiev pour dénoncer le violent plan d’austérité que veut mettre en place le gouvernement. Le plan prévoit en effet un plan de licenciement de 10% des travailleurs du secteur public, la fermeture de 400 écoles, une baisse des bourses d’études, un triplement des prix du gaz, l’augmentation des frais d’inscription dans les universités, etc. L’objectif de ce plan est de rembourser les dettes de l’Etat ukrainien au FMI.

Bosnie  : « Tuzla, Bosnie, aujourd’hui 1er décembre 2014 : le rassemblement des ouvrier-e-s de plusieurs usines et… une forte présence policière. Les paroles de l’ouvrière face aux flics venus en force protéger le bâtiment du gouvernement local : "Vous ne m’arrêterez pas ! Je suis prête à mourir ici aujourd’hui, pour que mon enfant ait de quoi manger demain."  »

Canada  : à Montréal, le 20 septembre près de 50 000 manifestants se sont réunis contre les attaques aux régimes de retraite des employés municipaux. Le 31 octobre environ 30 000 manifestants ont fait de même contre les coupures dans les services publics et le 29 novembre près de 100 000 ont exprimé leur mécontentement contre l’austérité générale.

Mexique  : Durant ces derniers mois, des dizaines de manifestations regroupant des centaines de milliers de participants dans plusieurs villes du pays ont bloqué massivement l’ensemble de l’économie pour dénoncer l’assassinat de 43 étudiants par la mafia avec la complicité de la police d’État. (cf. notre article dans ce numéro)

Chine  : En automne, dans la province nord-est du Heilongjiang, 20 000 enseignants étaient en grève contre les bas salaires. C’est un rare exemple connu d’un conflit de travail dans le secteur public du pays. Le 18 décembre, des centaines de policiers ont fait irruption à la société Artigas Vêtements & Maroquinerie à Shenzhen, pour disperser les travailleurs qui étaient en grève depuis neuf jours pour réclamer leur assurance sociale et fonds de prévoyance du logement primes obligatoires. Il y a eu une hausse de 11,1% des conflits de travail par rapport à l’an passé. La plupart de ces conflits portent sur les salaires impayés, les licenciements, la rémunération, l’assurance et les avantages travaille, entre autres facteurs.

Égypte :  « les 11000 travailleurs de la Compagnie des Fers et Aciers dHelwan (…) sont entrés en grève avec occupation samedi 22 novembre 2014 pour exiger, principalement, le paiement de leurs "bonus" (une participation aux bénéfices), le limogeage de leur directeur et la ré-embauche des ouvriers licenciés précédemment, notamment lors de la grève de décembre 2013 » (http://alencontre.org/) Ils l’ont ensuite suspendu temporairement afin de ne pas être associés par le gouvernement à une manifestation islamiste prévue quelques jours plus tard.

Gabon : Grève dans l’industrie pétrolière, le 11 décembre 2014  : une partie des ouvriers de la production pétrolière du Gabon était en grève à l’appel du principal syndicat des employés du secteur pétrolier. L’Organisation nationale des employés du pétrole (Onep) a entamé une grève générale et illimitée le 1er décembre, protestant notamment contre des licenciements de personnels.

Madagascar : émeutes ouvrières meurtrières. À l’origine, une grève est déclenchée pour des revendications salariales dans la société sucrière Sucoma. Des émeutiers armés ont attaqué le siège de la gendarmerie à Morondava en novembre. L’arrestation de sept grévistes de cette société gérée par des capitalistes de la Chine a mis le feu aux poudres.

USA : À l’occasion du « Black Friday » (vendredi 28 novembre), les travailleurs de la chaîne de magasins Walmart se sont mobilisés à travers tous les Etats-Unis. Pas moins de 1600 grèves et manifestations ont été organisées à travers le pays et ont mobilisé plusieurs dizaines de milliers de travailleurs. Les travailleurs réclament un salaire minimum de 15$ de l’heure.

Afrique du Sud : Grève des employés des postes sud-africaines « C’est la grève la plus longue depuis fin 2012 », reconnaît la direction. Cette grève a débuté par une grève sauvage en 2013 des salariés temporaires à Pretoria, excédés d’enchaîner les CDD.

Bien que non complète et ne rassemblant que les principales informations qui nous sont parvenues ces derniers mois, cette liste de luttes ouvrières indiquent bien une tendance réelle et manifestent les potentialités et les limites des combats ouvriers à ce jour. Nous pouvons les résumer ainsi : tous les continents sont touchés, pays centraux du capitalisme et pays émergents, par des luttes ouvrières qui s’opposent aux attaques redoublées de manière simultanée. À ce jour, ces combats souvent massifs restent, pour l’essentiel, sous le contrôle politique de la bourgeoisie, particulièrement de ses syndicats. Néanmoins, et malgré leur sabotage, la combativité ne faiblit pas et quelques secteurs du prolétariat international plus avancés tendent à se libérer de l’emprise des syndicats et de l’État par des grèves sauvages, des mouvements spontanés, voire par des tentatives d’opposition, de paralysie et donc d’affrontement à l’appareil d’État. C’est précisément sur cette voie que le prolétariat en Grèce s’était engagé au plus fort de sa lutte contre les effets de la crise au cours des années 2008-2010.

C’est dans cette voie que les ouvriers en lutte doivent s’orienter. C’est dans cette voie que les groupes communistes doivent avancer des orientations de lutte et adapter leurs mots d’ordre.

Normand , décembre 2014.

 

[1] . Certains groupes anarchistes ont tenté d’entraîner derrière eux des prolétaires dans la défense de la bourgeoisie kurde à Kobané en Syrie.

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