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Disparition du camarade Alberto (21 août 2014)

C’est avec une très grande tristesse que nous venons d’apprendre le décès du camarade Alberto. Pour ceux d’entre nous qui l’ont connu, qui ont eu l’honneur et le privilège de lutter à ses côtés, et même de développer des relations personnelles amicales étroites, l’émotion est considérable.

Le camarade venait d’un petit village de l’État d’Oaxaca au Mexique. Avec son frère Vic et sa famille, ils avaient dû s’exiler à Mexico ville pour s’être opposés aux petits caciques locaux qui cherchaient à les tuer – pour qui connaît les romans de B.Traven et sa description des relations quasi féodales des campagnes mexicaines (au moins jusqu’aux années 1990), il sera facile de comprendre ce que les camarades ont vécu.

Une fois à Mexico, Alberto et son frère sont devenus ouvriers d’usine. Confrontés directement au capital, ils ont continué à s’engager et à lutter contre les injustices et la misère dans différents cercles et groupes. Finalement, ils participèrent à la constitution du Grupo Proletario Internacional. Ce groupe, mélange de positions gauchistes et de position de classe, prit contact avec le CCI dans les années 1980. Dès la première rencontre, celui-ci insista pour que les camarades engagent un processus de discussion afin de rejeter les positions gauchistes et de pouvoir réellement rompre politiquement avec le camp bourgeois. Un des 4 membres de l’organe central du GPI, Alberto, toujours discret, parlant peu mais posément et de manière tranchée, fut celui qui fit pencher la balance au sein de l’organe central, divisé, pour que la grande majorité des membres du groupe finissent par rompre avec le gauchisme et engagent un processus de discussion des positions du CCI. A l’issue de ce processus difficile et douloureux du fait de résistance au sein même du groupe (certains de ses militants refusèrent de suivre cette voie et la rupture fut violente), les camarades, au nombre d’une vingtaine, adhérèrent au CCI et fondèrent sa section territoriale Revolución Mundial. Par la suite, Alberto nous conta comment, au cours de ces discussions intenses qui duraient toute la nuit (alors que la plupart des camarades étaient ouvriers d’usine aux conditions de travail épuisantes), il mâchait des piments pour ne pas s’endormir et tenir le coup !

Malheureusement, deux ans plus tard, le camarade fut frappé par une attaque cérébrale qui l’handicapa pour toujours. Au prix d’efforts et de démarches sans fin, il obtient une misérable pension d’handicapé lui permettant à peine de survivre s’il n’avait eu le soutien de sa famille, de son frère Vic, et des camarades de l’époque. Il ne retrouva pas toute ses capacités physiques au point de ne pouvoir s’exprimer et lire qu’avec difficulté. Il n’en resta pas moins un militant actif au sein du CCI et était connu dans les manifestations de rue pour sa diffusion active et militante de la presse communiste.

Lors de la crise de 2001 du CCI, il fut parmi les quelques camarades de la section mexicaine qui refusèrent de céder à la panique, au chantage à la dissolution de la section, et aux ignobles provocations et mensonges que la nouvelle direction du CCI (envoyée sur place) exerça de manière scandaleuse sur la section et ses militants abasourdis lors d’une conférence ’pan-américaine’ qui restera dans la mémoire de tous ceux qui y participèrent par sa violence et son outrance : la section, la deuxième en importance du CCI, restait largement majoritaire sur les orientations ’internes’ et externes précédentes qui avaient été adoptées... à l’unanimité tout au long des années 1996-2001 et qui était (silencieusement) liquidée au nom de la ’lutte contre le soi-disant clan’. Dans la débandade générale et la capitulation politique piteuse de la plupart, il fut donc parmi les rares qui restèrent fidèles aux orientations politiques ’internes’ et externes adoptées ce qui en dit long sur la force de ses convictions politiques et son engagement malgré son handicap... alors qu’il était sans doute l’un de ceux pour qui la rupture avec ses camarades, et souvent amis de longue date, présentaient le plus de sacrifice au niveau de sa vie sociale (solitude).

Membre de la Fraction interne du CCI, il continua à militer – on le voyait toujours diffuser le Bulletin de celle-ci et ses tracts dans les manifestations, y compris auprès des militants du CCI qui l’avaient rejeté, calomnié et dénoncé publiquement. En 2009, au cours de la séparation entre la fraction interne et ce qui allait devenir la Fraction de la Gauche Communiste Internationale, Alberto, son frère Vic et le camarade S. se rangèrent du côté du maintien de la FICCI. Malheureusement ce groupe ne réussit pas à se développer et les camarades cessèrent petit à petit toute activité politique. Pour ceux d’entre nous qui l’avaient connu, nous ne désespérions pas de le voir revenir à nos côtés dans le combat pour le communisme.

Il y a quelques mois déjà que nous le savions malade et qu’il ne pourrait gagner ce dernier combat.

En écrivant ces quelques mots, le rédacteur contient difficilement son émotion et ses larmes. Camarade Alberto, nous te saluons et continuerons ton combat, celui-là même auquel tu avais dédié ta vie, celui-là même du prolétariat international et des exploités du monde capitaliste. Nombreux sont les anonymes comme toi dont, en te saluant, nous saluons la mémoire. Nous savons que c’est comme cela que tu considérais ton engagement communiste, loin de toute personnalisation, de tout carriérisme, de tout ’ego’, au sein de notre classe. Alberto, pour les camarades qui ont eu le privilège de lutter à tes côtés, c’est une partie d’eux-mêmes qui tu viens de leur enlever. Dans nos mémoires tu es, dans nos mémoires tu resteras, et alimenteras nos convictions et notre engagement.

Au camarade Vic, son frère, et à sa famille : nous partageons votre peine et vous apportons tout notre soutien fraternel.

GIGC, 21 août 2014.

(Publieé sur http://igcl.org: 9 septembre 2014)

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